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Poèmes en français

Poèmes de Lenous Suprice (Nounous)

Gorée

Île témoin de beaucoup de départs sans but précis
pour les partants s’entend
nous te saluons.

Un peu par atavisme
nous te (re)voyons dans la mémoire
aujourd’hui encore
comme un port receleur.

Nous nous (re)voyons avec les mêmes poids
Congolais d’hier
et combien d’autres assurément
sous les lourdeurs du déracinement
encore aujourd’hui.

Nous nous (re)voyons dans la boue
sur les traces des autres
les mêmes depuis toujours
qui ont tout perdu
avant même d’avoir la rançon des clés
par-dessus les chants fermés.

Humanitude

Il y a des dimanches encore, dans la mémoire, pour retracer les vœux cassés par l’imposture, et tant de lèvres autour, pour donner formes et couleurs à la mie invisible, au vieux vin d’une parole toujours à déchiffrer par l’entendement, en vue de…

Il y a des enfants qui rient et des ormes florissants,
en la saison qu’Aimé Césaire nous a léguée, nous, braves, travailleurs, poètes et tous les autres de la même provenance, chacun distinctement (pris) dans l’art d’être, de se débattre, afin que vivre soit une matière abordable, un champ de blé ouvert, en attente toujours de bras à instruire et à éduquer, pour la plus que belle récolte d’une fraternité, d’une humanitude sans frontière, en toute polyphonie, à instituer au centre de l’essentiel.

Pour la payse *

Dans son château
décrépitude ainsi devenue par tant d’assauts du dehors
et du dedans surtout
rien que pour détruire qui parlent ou qui s’animent
ces heures dernières
la haute Terre à n’en plus finir s’embourbe.

Empressons-nous à tue-tête
dans nos regards
pour la Payse
de souhaiter longue ville aux pas vagabonds de la poésie
belle et suave symphonie de fleuve à leur établissement
dans nos murmures
par entente réfléchie.

Inventons des instruments pour bien la conjuguer
loin des mangroves de la tristesse
forêt revivifiée de perles inaltérables
insaisissable verbe dans tous ses éclats de chevaux en désir…
en route vers d’autres délices
d’autres pacages plus convenables.

Situons-la loin
très loin de toutes les baladeuses
sur leurs pervers chemins
tant de fois qui heurtent (très) lourd
par la déforestation du bien commun
sous prétexte fallacieusement du contraire
avec des chiennes de bottes vraiment trop grandes
pour leurs petits pieds d’insensibles.

Empressons-nous à tout rompre
de mettre feu à ses laideurs
moi ton semblable qui n’ai plus envie
d’être toujours cette timide rivière
sans entrain ni atours
et toi-même mon égal qui ne te reposes plus dormeur
sur un tas de lubies sans fin à présent
mais plutôt nous deux
bien fondus aux autres du même acabit
ambitieux rêveurs à tout casser que nous sommes.

Empressons-nous
rêveurs accomplis
par le poids des circonstances tirailleurs devenus pour la Payse
nous-mêmes à travers les tranchées des vaillants
irrémédiablement nous tous qui tenons
à sauvegarder en bouche sans coup férir
à l’unisson avec combien d’autres encore
une Annaïse harmonie de parfum libérateur
pour déchirer les repères des anciennes blessures
afin de commencer à écrire les premières mesures
d’une définitive cicatrisation pour l’occasion.

À tue-tête empressons-nous
de souhaiter belle et longue ville à nos espoirs
nos véritables promeneurs en poésie
aussi suave et belle affluence de fleuves du renouveau
à leur capacité de dépassement
dans leurs conquêtes mystérieuses d’instruments paraboliques
pour la retaper
couleur impérissable en tous les sens
afin qu’elle se fasse peinture-passion
et forêt inébranlable de luttes constructives contre tout asservissement.

À l’envers des entonnoirs du malheur
installons-nous
pour une autre chanson à refrains divers
sorte d’hymne non pas ce coup-ci en éloge à la sévère belliqueuse
cette faucheuse qui n’est pas si belle que ça en tant qu’éclat
sur le reposoir des guérilléros de nos mouvements en liberté universelle
mais plutôt un chant solennel pour exprimer
toute la grandeur du vivre beau à tous et de partout
au territoire sans fin de notre vagissement antérieur.
* Extrait de Payse au vent, un nouveau recueil de poèmes.

—Lenous Suprice

Poèmes de Bobby Paul

Dans les yeux de la foule

à mille lieux
les contemplant
dans les yeux de la foule

ils se ressemblent tant
qu’on les trouve semblables
à des grains de sable
sur la plage
des étoiles
dans le ciel
des oranges mûrs
dans un large panier
des roses rouges
formant un grand bouquet
ou des bouteilles incolores
placées sur une grande étagère

à mille lieux
il est impossible
de traduire leur genre
leur nuance
et même leurs défauts

ils sont tous beaux
ils sont tous précieux

à mille lieux
dans la foule en liesse
tous ils ressemblent
à de joyeuses gouttes de pluie

à mille lieux
dans la foule en larme
tous ils se rassemblent
en infinité de tombeaux pâles…

Sans prix

la marche est impossible sur l’eau
la nage trop facile dans les larmes
en lui tout se noie dans des idées de plomb
parce qu’il n’a pas su apprendre le vocabulaire
des baleines et des sirènes des abysses

pêcheur de mots
quand le prix à payer
pour semer ses cris dans le vent
s’additionne à ses innombrables maux
il se retrouve condamné à mort
aux pieds des murs sympathisants

et la mer dans ses yeux morts
reste une étendue mystérieuse
qui cadence balance et love
inlassablement les inquiétudes
et le secret de la blessure mortelle

Récit d’ombre

rue des miracles
à quelque beau lieu
de la rue bonne foi
dans un bar de joie intense
où tous les désirs et plaisirs
viennent tenir haut la nuit
les tièdes soleils de minuit
une ombre grise mais souriante
au comptoir seule s’accoude

elle a un verre en main
une cigarette noire allumée
pendue vaguement à ses lèvres
elle est plongée dans une attente
muette calme insouciante
pensive comme un prédateur

pendant ce temps tourne
tourne tourne sans répit
un air de smooth jazz
sensuel langoureux
jusqu’à mettre en transe
tous les mystères de la nuit

alors dans les bras de la piste
sous les yeux multicolores
des lumières qui chantent
des dizaines d’ombres rouges
et des silhouettes roses
dansent étroitement enlacées

enfin
quand dans les cieux disparaissent
la lune et toutes les étoiles fatiguées
brusquement s’arrête la musique
et l’aube voit partir ensemble vers l’inconnu
l’ombre grise et une silhouette rose…

Blues de fin de semaine

la fillette vient de perdre
ses petites dents de lait
pourtant elle n’a rien de laid

je vais calme sous le cèdre
la chanter une berceuse
pour la rendre heureuse

puis je la dirai tout bas
que maman presse le pas
pour rentrer du boulot

où elle côtoie salauds
badauds et passeurs
défilant toutes les heures

et chaque fin de semaine
pour le prix de ses peines
quelques gourdes ça rapporte

sa vie est faite de maux
que ne peuvent les mots
décrire en aucune sorte

Le dactylographe

justement
je tape
je tape fort
et souvent

je tape
je tape
je tape fort
les mots
de mes maux

quand la pluie s’étonne
elle tape, elle tape des O
sur le calme de l’étang

comme moi
justement
qui tape
qui tape fort des O
sur l’indolence
de mes émois

Trente héros

sur le marché mondial
l’équivalent de trente héros
est une infinité de croix au cimetière
qu’on fasse multiplier pour un gain
au prix des grands maux des autres

avec le doux fruit du profit des trente héros
on peut s’acheter en grande quantité
des diamants bleus et de l’or noir
avec ce pouvoir en main
c’est facile d’écarter lentement
de jeunes jolies jambes
qui sur les pelouses des villas blanches
se bronzent à loisir au soleil vert
en fin de compte il faut savoir
que l’abondance est importante
pour le maintien sûr et certain
d’une vie belle et rose
et douce et super molle

qu’importe si la « racaille »
goulûment mange le maigre fromage
de son chômage imposé
pour payer le droit à la liberté d’expression
de ses propres mots qu’elle sème au vent
trente lourds euros sont à soustraire
de l’allocation alimentaire de ses enfants

ma foi
trente héros
ou trente euros
ça rend les heures bien tristes
pour toutes les moyennes et petites bourses

—Bobby Paul 2009

Poèmes d’Edner Saint-Amour

Autonomie

La vie au processus du mouvement de l’existence
À priori repose sur deux principes d’immanence et de transcendance
L’un qui pose que la vie est liberté
Un destin libre attribué à toute l’humanité
L’homme ne choisit pas la vie c’est la vie qui l’a choisi
L’homme est né libre, droit sacré, droit à la vie
Le second pose que la liberté est effective dans l’autonomie
L’homme pour son propre salut de survie a la responsabilité d’être autonome
Se charge de son propre moyen d’existence, c’est ça qui fait l’homme
La vie comme liberté est une marche, une course, se tenir débout est un pré requis
Se tenir débout sur les deux pieds, c’est être autonome, avoir son autonomie
Pour marcher dans la course il faut pouvoir d’abord se tenir
L’autonomie c’est la base essentielle de la sécurité du présent et de l’avenir
La liberté s’exprime dans la vie, et s’affirme dans l’autonomie
Être responsable de son existence c’est se charger de sa propre autonomie
L’homme est un être de talent dont la volonté choisit une profession ou un métier
Son autonomie, son affirmation sociale confirmée par la collectivité
L’homme s’affirme, la société le confirme membre actif de l’humanité
L’enfant, homme en devenir, le parent l’éduque non pas pour rester chez ses parents
Non pas pour vivre éternellement chez les parents pour en demeurer dépendant
Le parent le charge d’avoir le métier de son choix pour ainsi devenir autonome
Pour devenir une effective personne, un être accompli, un vrai homme
Autonomie atours indispensables à la personne, à la vie, à la liberté
Autonomie atout essentiel à la personne, à la vie, à la liberté
Autonomie un tout fondamental à la personne, à la vie, à la liberté
Autonomie primauté à la personne, à la vie, à la liberté
Certes l’autonomie repose sur une identité attribuée à l’ego
Atout atours qui garantissent présent et avenir, protection, travail et repos
Souvent on reproche à l’autonomie un égoïsme mordant
Ou un égocentrisme exacerbant ou un narcissisme effrayant
Qui pousse même à la solitude volontaire afin de garder liberté et acquis matériel
Soit pour se contempler, pour se glorifier, se satisfaire, vie personnelle inconditionnelle !
C’est plus un défaut à attribuer à la personne plutôt qu’à l’autonomie
Condition sine qua non, la liberté presse la personne à l’autonomie
La charge de son propre moyen d’existence, se tenir débout, être responsable face à la vie
Avoir la main sur le volant de la destinée, sur le volant de la vie
L’homme n’est pas un être d’un ego bouché follement égaré dans la solitude
L’homme est un être grégaire qui cherche l’homme pour vivre sa vie en toute plénitude
D’ailleurs c’est une illusion de vouloir réduire l’autonomie à l’égoïsme
Illusion de vouloir réduire l’autonomie à l’égocentrisme ou au narcissisme
Relative, l’autonomie est à la fois une marque individuelle et une marque sociale
La personne choisit son métier parmi les talents socialement pris en charge
On naît puis on trouve la charge indispensable qui nous attend
Une fraternité mise en place par la société sanctifiant métiers ou talents
Par le métier on rend service en retour d’un salaire avec quoi on gagne sa vie
Une symbiose, un échange réciproque entre individu et société, qui garantit la vie
Si l’homme vit seulement de solitude, si grande soit sa richesse assurant son autonomie
Après un siècle, l’homme périra, l’humanité disparaîtra, la vie carrément anéantie
La pérennité de l’espèce humaine dépend d’une transcendance : donner la vie
Au fond nous ne savons de quoi la vie faite mais avons pour mission : donner la vie
L’autonomie garantit le salut matériel, l’amour garantit le salut de toute l’espèce
Ô Amour combien beau est l’amour ! Ce sentiment qui ennoblit l’espèce
L’homme est un être doué d’affection qui tend son cœur vers l’autre
Amour fraternel, Amour congénital, Amour conjugal, toujours à la recherche de l’autre !
Ô aimer, croître, multiplier, s’étendre, perpétuer, conserver la vie
Ô aimer se conjuguer, s’engager, se réjouir, conserver la vie
Heureux l’homme qui sait aimer, s’aimer, aimer la vie, la vie est AMOUR
C’est une mission, un devoir humain que nous exige la nature ou le divin
Oui ! La mort est la raison finale de tout, mais l’amour triomphe de tout
Richesse donnant l’autonomie connaît le présent, l’amour donnant la vie connaît l’avenir
Mais quand richesse et amour s’allient pour de bon, même Dieu se met en mode du délire
Jouissance matérielle, jouissance affective, l’idéal, le bonheur parfait
Ainsi dans la barque de la vie on fait le voyage sans bobo sans abcès

À part la fraternité à la base de réciprocité ou de symbiose
Il existe la fraternité centrée sur l’altruisme, noble et grandiose
On donne sans rien espérer en retour, de la gratuité, on fait un don
Un acte d’amour, de charité, sens de vertu en mode de prédilection
L’autonomie est essentielle mais ne concerne que les personnes actives
Sans fraternité altruiste bien des vies seraient détruites, trop fictives
Le monde des enfants, des malades chroniques, des vieillards, des handicapés
Serait incapable de vivre, la vie s’identifierait au nom de l’impossibilité
Soyez de bons samaritains, cultivez l’altruisme, posez des actes d’amour
Ne soyez pas égoïstes, tendez la main à l’autre, heureux seront vos jours !
Que L’autonomie et la liberté soient à l’autre une source de vie
Que l’Amour et la conscience soient à l’autre une lumière pour sa vie
Réalité complexe, réalité de la vie, réalité de l’existence
La vie à la fois indépendance, interdépendance et dépendance
Rend possible la course de l’existence qui s’actualise, se réalise
Vivez pour vous-même toujours, vivez aussi pour l’autre ainsi vie se concrétise
Le créole haïtien dit en proverbe : « de mèg pa fri » c’est toute une vérité
L’aveugle ne conduit pas l’aveugle, sans le risque de ne se faire frapper
Pour partager avec l’autre son prochain, à priori il faut avoir
C’est même une responsabilité face à son prochain d’avoir
Quand l’autonomie s’allient à l’altruisme on peut mener une vie vertueuse
Le partage, la charité, la compassion conduisent également à une vie heureuse
Il faut donner mais aussi condamner l’oisiveté, la fainéantise, la paresse
Acte irresponsable face à soi même et à l’autre, existence en volontaire détresse
Quoique actif le paresseux n’est utile ni à lui-même, ni à l’autre ni à l’humanité
La paresse est une absurdité qui soumet celui qui la vit à une folle destinée
Le paresseux qui vit de l’aumône tout en étant en possession de ses pleines capacités
Est un méchant face à lui-même et à l’autre pauvre qu’il prive d’une partie de charité
Pour être vertueux il faire avoir, disposer des dons ou biens
Pour faire acte de charité, pour tendre la main à son prochain
Sinon la vertu se cantonne dans la seule limite morale
Le seul sentiment de ne pas causer à son prochain du mal
La vertu ce n’est pas seulement une simple question du sentiment du bien
Il faut la traduire en geste et acte, il faut poser l’acte du bien envers son prochain
C’est quand le sentiment s’allie à l’acte du bien que la vertu est complète
Sinon elle reste un simple mot que nous mettons dans le cœur et la tête
Comment être vertueux en paroles à consoler quelqu’un se mourrant de faim
Sans poser  aucun geste concret, aucun acte, sans lui tendre la main ?
À mon sens cette vertu douteuse, reste vide, tient lieu même de l’hypocrisie
L’homme ne vit pas seulement de bonnes paroles mais aussi de pain, vraie vie !
La paresse est un péché aussi bien que l’égoïsme n’apporte salut à la vie
L’autonomie dont vous jouissez doit être pour autrui occasion de secours à la vie
Chacun a droit d’exister justement parce qu’au monde il n’y a pas que le MOI,
L’autre existe, de la relation avec l’autre constitutive avec la relation avec soi
Soucions-nous des autres, de l’autre, vivre c’est échanger, l’autre existe bel et bien
Que le surplus que vous procure l’autonomie soit le salut du prochain
Travaillez pour l’extra, le surplus, ne vous contentez pas seulement du nécessaire
Le nécessaire pourvoit au moi n’est pas consécration de l’humanitaire
Donnez toujours donnez toujours donnez votre vie sera récompensée
Votre existence sera comblée de bonheur, de fraternité, d’amitiés.
Toutefois dans le capitalisme où l’on privatise les moyens de production
Cette privatisation s’étend aux talents, aux métiers et aux professions
Comme quoi l’ouvrier n’est pas libre, n’a pas sa pleine libération
Il a toujours quelqu’un à sa tête qui le contrôle, un boss et un patron
Si on aspire à jouir de sa pleine liberté, sa pleine autonomie
Il faut créer sa propre entreprise, marchandise qui vaut le prix

(5 août 2009)

Ode à la liberté de la femme

Le cri de la liberté de la femme
Est un feu qui doit s’embraser de toute flamme
Le cri de la femme pour la liberté
C’est le cri du monde, de toute l’humanité
Une cause générale et commune
Une quête sans acceptions aucunes
Une quête de liberté qui concerne toutes les races
De la femme noire ou blanche à la femme chinoise ou arabe

La libération de la femme, cette âme prisonnière
Est une cause sans limite qui transcende les frontières
Le cri de la liberté sort de l’âme et de la tête
L’écho retentit sur les cinq continents de la planète

La lutte de la liberté de la femme vu son noble idéal
Est une lutte planétaire, une lutte qui se veut mondiale
Personne sans exception n’a le droit de s’exclure
Dans la grande quête de la liberté, cette noble aventure

Le politicien qui de la femme convoite le vote
Doit donner son appui, quitte à agrandir sa côte
Le poète qui fait de la femme une déesse adorée
Doit mettre la main à la patte, quitte à convoiter le charme de sa beauté

La femme doit briser le cycle de fictifs personnages
Pour connaître à l’échelle mondiale d’estimables rôles et images
L’étendard des droits dans l’optique d’une égale existence
Doit conduire toutes les femmes vers et à l’indépendance

Que tous se lancent à l’assaut du salut de l’âme
Partout à travers le monde à la conquête de la femme
Que la volonté bouge, en s’armant de fermes convictions
Pour essayer de faire de la femme changer de vision

La conquête de la femme n’est pas une tâche toujours facile
De nombreux obstacles à surmonter, mais pas impossibles
À s’implanter dans un pays sans renier ses racines
Relève d’un exercice subtil, mais faut déjouer la vieille routine

Femmes des quatre coins des cinq continents de la planète
Unissez-vous, unissez vos âmes et vos têtes
Union fait la force pour conquérir la liberté
Union fait la force pour changer la destinée

(24 juillet 2009)

—Edner Saint-Amour

Poèmes de Jean Saint-Vil

Je n’ai plus le temps des illusions

Je n’ai plus le temps des illusions,
Le temps des rêves à l’eau de rose
Des bons vieux temps de l’adolescence,
Des embellies de ciel est beau
Où les rayures sont des sillages
D’engins volants haut dans l’espace,
Et d’un pays plein d’avenir
Pour tous ses fils « natif natal ».

Je n’ai plus le temps des illusions
Des âges d’or plein l’horizon,
Et des Édens prédestinés,
Des bons diseurs et grands diserts
De pays nouveaux, qui sèment
Partout la bonne nouvelle.

Je n’ai plus le temps des illusions,
Envolées comme de la poussière
Dans la colère d’un vent rageur,
Évaporées dans l’ammoniac
Qui monte au nez comme la moutarde
Dans les vertiges de fumée blanche.

(le 9 mars 2010)

Tout en Éros

Que tombent les mots d’amour,
En cascade de tendresses
De lèvres qui parlent Éros,
La langue de l’univers.

Que tombent les mots d’amour,
De lèvres qui boivent d’autres lèvres
Au compte-gouttes des baisers,
Juteux comme des mûres.

Que tombent les mots d’amour,
De lèvres qui bruissent bas
Comme le froufrou de la soie,
Effleurant d’autres lèvres.

Que tombent les mots d’amour
De lèvres muettes de désir
À la vue d’autres lèvres
Qui ne vivent que d’amour.

(le 25 mars 2010)

Trop tard, trop tôt

Trop tard pour cesser de t’aimer,
Dans tes manèges de qui-perd-gagne.

Mais trop tôt pour sécher toutes les larmes
Du déluge de tous mes chagrins.

Trop tard pour enfin t’oublier,
Si frais sont mes souvenirs.

Mais trop tôt pour enfin t’en vouloir,
Dans l’espoir d’un juste retour.

(le 27 mars 2010)

Mes sourires favoris

J’aime tant les sourires
Qui avancent en silence au pas de course,
Comme des valses lentes,
Au centre de visages,
Sans rides et sans raideur
De femmes de bonne humeur,
Dans l’étau de mes bras.

J’aime tant ces sourires,
Poudre aux yeux dans mes yeux,
Source d’air frais émoulu
Faisant perdre le nord,
Dans la vive turbulence,
De mes yeux éblouis
Par le feu de l’amour.

(le 1er avril 2010)

Nostalgies

Autant que je me souvienne
Du lointain plein écran,
De mon enfance amère
Au temps de mes vingt ans.

Autant que je me souvienne
De ces serpents de mer
Tués dans l’œuf du suicide
Comme ces nouveaux-nés,
Sans futur ni passé.

Autant que je me souvienne
De mes success stories
Partis dans les vapeurs
De mes baisers perdus.
(le 31 mars 2010)

Chemin faisant

Chemin faisant,
De pied en pied,
Par les forêts,
Par les montagnes,
Par les saisons,
À chaque pas,
À perdre le souffle,
De dérapage en dérapage,
Tu as semé,
À pleines mains,
Les ingrédients
Qui font recette,
À tout gâcher
Sur le terreau
De la solitude.

(le 28 mars 2010)

Les arbres dans la nuit

Changent-ils vraiment de peau après le crépuscule pour s’imprégner de la couleur du cambouis de la nuit qui vient pour ne rien faire, qui vient pour ne rien dire ? Ou jouent-ils les fantômes rien que se protéger de toutes formes d’agression aux heures où le soleil brille par son absence ?

S’ils ne se couchent point, à l’instar du soleil, qui depuis sa naissance ne connaît point de veille, leur seul péché mignon est de se mettre à nu, exhibant leurs squelettes, le temps d’une saison, leurs feuilles battant de l’aile autour de leurs longs pieds, tout en s’ offrant au vent. Aux embellies de l’année, ils savent se rattraper, affichant les termes idoines de l’équation des trois F, qui donnent feuilles, fleurs et fruits.

(le 28 mars 2010)

Plaisirs

Plaisirs des corps
Qui perdent le nord
Et qui cherchent une boussole,
Dans les vapes des étreintes.

Plaisirs des âmes
Qui s’envolent,
Propulsées par les feux
Des coups de foudre de l’amour.

(le 29 mars 2010)

L’oiseau qui nous réveille

Sur l’arbre qui s’ébroue,
Seul un oiseau s’ébat,
D’une branche à une autre,
Comme pour me secouer
Du calme de mon sommeil,
Tantôt, il disparaît,
Comme de la poudre aux yeux.
Tantôt, il tourne en rond
Comme une toupie sur pied.
Tantôt il fait des sauts
Mi longueur, mi hauteur,
Comme le vent qui s’agite,
Sur fond de vert qui surfe
Dans l’or blanc de l’aurore,
Signal du jour en marche,
Sur la pointe des pieds,
Au seuil de l’heure de pointe.

(le 1er avril 2010)

—Jean Saint-Vil

Poèmes de Mario Malivert

Ta mauvaise mine

une rondelle de lune sous mes ongles
pour incendier la prunelle de tes yeux
la vrille au bout de mes doigts
scintille en brins argentés

je t’achète une cornemuse pour serrer tes moues
je te dresse un pilori pour crucifier ton tourment

si ton blues a une histoire à décanter
qu’il se hâte
mon attente gicle en mille brisures

peut-être faut-il refaire la vie
de ville en ville d’île en île
étioler l’ennui remplir le vide
effilocher le silence

Des mots

quand les asphaltes
transpirent de leur souffle brûlant
quand le parvis des cathédrales
trépasse sous le poids des cris
quand les tintouins du quotidien
déracinent les lys d’espoir
il est temps de rêver de papier
et de mots

des mots pour traverser le Pacifique
à pied sec
pour vilipender les obélisques

vois les yeux glauques
rires retenus lèvres efflanquées
pieds éclopés à sillonner les chemins de cabri

les mains pendillées
la manne accrochée aux cerfs-volants
ma besace vide gorgée de vent
malgré mes quarante ans à vanner
dans les toundras séculaires

le cap sur le pays où coule le jus verdelet
des pommiers fleuris
pour remplir les pochettes sous mes yeux
pour retrouver l’éclairci des aubes
l’accalmie
mais les citernes renversées au long des avenues
sont vides
l’or escompté dégouline dans l’Atlantique

il ne me reste que mes mots
mes vers à soulager mon spleen

les nuages bistrés se hissent dans l’éther
girouette des temps revêches
leurs effluves aspergent mon visage
pleuré-je de liesse

Mise en garde

des crapauds
me regardent de leurs yeux grenades
leurs voix éraillées
harangue des bas-fonds boueux
me lancent une mise en garde

sur la pointe des yeux
je constate le sombre du nid à moustiques
et je fais pleuvoir ma pluie de cailloux
sur les paupières bosselées de mes fiers adversaires

quand je passe plus tard près de la mare
même pas un coassement

Passe-temps

carillon du soir entre l’ébahi des galbes luisantes sur les nattes
la lueur dansante des lampes
senteur brûlée du gaz
le cru du vivre

les ébats dans le noir

dans neuf mois une autre bouche à combler

pas de boulot
la nuit on n’dort pas
les yeux ouverts
demain y aura-t-il
de quoi manger ?

la chaleur entre les chambres du cœur
les seins qui sautillent
la peau en extase sous les doigts

pas de boulot
la nuit on n’dort pas
on fait l’amour

Vendeuse d’eau

ses maux se collent aux sachets de plastique remplis d’eau
elle déambule la taille fine ceinturée par une banderole
sous le poids du soleil
entre les rues du Centre et des Miracles
une sandale aux pieds

ne dis rien…

la poussière entre les cils des bronches
elle tousse et crache le crachat vert du désarroi
elle attend le soir pour compter ses vingt gourdes
—cinquante-trois gobelets d’eau vendus

ne dis rien…

elle attend ce soir la visite du cireur de chaussures
son amant de trois ans
un jour ils auront des enfants
mais ce soir sous le regard argenté de la lune
ils feront l’amour sur deux chaises
arrangées cote à cote sur la véranda

ne dis rien…va ton chemin

—Mario Malivert

Poèmes de Tontongi

Souvenir de la fille d’or

Ses cheveux couleur de l’or
Rimant avec l’ensemble de son corps
Font scintiller mille étincelles
Rendant sa présence vraie et éternelle.

Ses yeux couleur de l’arc-en-ciel,
Le bleu évoquant le ciel,
Le vert enchantant l’espérance,
Le jaune et le reste formant une danse
Créent un être de rêve.
C’est une Ève.

Son regard est un sort
Il terrasse et endort
Il fait naître la passion
Et inhibe la raison.

Je l’ai rencontrée plus d’une fois
Mais toujours me met-elle en larmes et en émoi.
La première fois au « Glue Pot »
Je tremblais sans dire mot,
Bénissant son apparition,
J’étais perdu dans sa constellation.

Un jour dans une bibliothèque
J’ai niché telle une marouette
Le goût de sa présence
Et depuis, elle ne m’est plus une absence.

(Reims, mai 1976)

Tontongi critique de Picasso

Usage et visage de bleu
triste et lamentable
de la femme aux seins nus
Picasso dansait et volait
comme un trublion de cirque
dans une irréalité éclatante
l’irréalité de la femme aux seins nus
perverse qui m’a placé dans une forêt africaine
dans la fausseté de la magie d’être Picasso
qu’il a voulu créer peut-être
car la femme au voile bleu ou rouge
créature de l’espace lumineux
triste aussi comme la femme aux seins nus
ouverte et fermée comme une parenthèse
est sensée le destin incarné
Picasso créateur enchanteur
ses créatures d’amour et de haine accouplés
auront comme par malheur fait durer la vie
et ce monde qui finira
il y a l’autre qui commencera
et qui finira comme Picasso.

(1981)

Rupture, viol, renaissance

(Épique d’une malvie en flammes)

Au feu ! Au feu ! Au feu ! Et d’un coup, entre le silence misérable et le voum-voum des sapeurs-pompiers, surgit une odyssée d’hommes et de femmes réels confrontant la nature et la difficulté d’être. Froid aux pieds, au ventre, froid dans un Moi ensorcelé, divisé entre l’appréhension, l’espoir, le désespoir et un peu de cynisme caché mais profondément révolté. Pourquoi tout ce festival de mouvements ? La vie des humains n’est-elle pas déjà, comme l’eut dit Kafka, à la fois une quête continuelle de l’Émerveillement et une grande indifférence ?

Miguelo, Christina, Felixio ou Mañuel furent les héros sans conscience de l’événement, revendiquant pour leur propre compte (même quand une lueur de compassion leur traversa l’esprit) toute la possibilité de la tragédie, y compris sa destructivité et sa productivité pécuniaire. Ils fustigèrent le Destin, tel un nouveau Moïse collectif, pour en faire leur destin ; et aussi, sans qu’ils s’en rendirent compte, questionnant nos propres ambivalences, les redéfinissant. Au feu ! Au feu ! Au feu ! Mais, vous savez, le feu a aussi consumé tout un plan d’existence que ces pauvres gens avaient patiemment élaboré. Déjà rejetés, malheureux et oubliés, on dirait que la sauvagerie destructive de l’élément incendiaire est comme venue purifier leur calvaire de damnés. Par transsubstantiation existentielle. Vous comprenez ?

Maloum, un sage de l’Afrique profonde transplanté en Amérique roboticienne, a avoué qu’il a passé la Noël en famille, paix, amour, gentillesse. Miguelo, Christina, Felixio et Mañuel, l’ont passée, eux, dans une chambre d’hôtel pour rescapés, mais avec autant de sainteté. Sainteté de pécheurs se communiant à la vie réelle, la vie de chaque jour. Feu ! Feu ! Feu !

Mais avant le feu, c’était une belle famille vivant à la fois en repos et en mouvement, mouvement cette fois-là de la pratique quotidienne ordinaire : dans le mainstream du non-Establishment américain. Christina préparait des repas dominicains épicés où elle a mis son âme et sa bonté : riz, pois, poulet, sauce, sourire. Felixio, tragique, état miséreux et comme défunt, a choisi cependant de tout affronter en colosse tacticien et en sage guru à la fois. Ricardo Lopez avait bien branché un revolver contre ma tempe et contre tout ce que je représentais dans la vie, mais il a vite compris que j’allais mourir comme lui, comme un pauvre bougre, comme un chagrin.

Feu ! Des cris d’au feu dans le square et, peut-être, partout, partout où nous nous approchons. Au feu ! Feu sur le Quartier Général ! Feu sur la Maison Blanche ! Feu sur le Palais National ! Et, d’un coup, à la place de l’héroïsme et de la lâcheté, nous trouvons le vide, l’ineptie, la décrépitude.

Perte, destruction, solitude, vide et, surtout, indifférence. Indifférence de pratiquement tout le monde quant à la destruction qu’a causée le feu chez ces pauvres bougres sortis tout droit d’un roman de Charles Dickens. Christina, désespérée devant la violence de la haine incendiaire, m’a dit que le feu lui a tout pris ; quand je lui ai fait remarquer qu’elle n’a pas vraiment tout perdu puisqu’il lui reste la vie. « Bah ! a-t-elle exclamé, quelle vie est-ce ça sans ma petite chambre meublée ? » Quand j’ai appelé mon ami Idi lui demandant comment a été son expérience d’un incendie quelques années plus tôt : « Tu sais, m’a-t-il répondu, d’un ton indifférent, j’étais plutôt déçu quand j’ai réalisé que le feu n’avait pas tout consumé ; je m’étais préparé à recommencer à neuf, comme j’étais venu au monde, sans les accessoires matériels encombrants ! » Quand je me plaignais que l’incendie a emporté les seules choses non matérielles que j’aie jamais possédées : mes livres, mes écrits, mes petits souvenirs sentimentaux ; un autre ami, Gregg, m’a répondu, air philosophique : « Tu te trompes, TontonGuy, tes petites choses non matérielles devraient être matérielles pour pouvoir être consumées. »

Le feu a détruit aussi à la fois mon amour pour une femme que je voyais et l’amour qu’elle me portait. Subitement, en plein de mon problème d’homme sans rien, elle a comme réalisé que j’allais devenir encombrant, c’est-à-dire plus un problème qu’un Roméo délicieux. Elle m’a laissé tomber, héroïque, sublime et un petit peu cynique. L’amour a ses raisons que le cœur n’influence pas !

Felixio a volé les 600 dollars de ticket de provision d’habits d’urgence que la Croix Rouge nous a donnés. Tout comme mon amour perdu, Felixio a volé par cet acte un peu de mon innocence et de ma confiance en l’espèce humaine. La police de Cambridge va chercher Felixio, parce qu’il a volé et la police se fout bien de l’immoralité du vol : elle fait seulement son boulot de flic. Terrible, sans conscience jusqu’à la dignité, Felixio a volé pour se sauver de la contingence, songeant, en pleine tragédie, qu’on puisse s’approprier le monde seulement par un acte. Un acte quelconque ; un acte qui changera le cours du Destin. Pourquoi, vraiment, a-t-il volé les 600 dollars ? Par vertu du vice ? Pourtant si j’étais le juge, humble, implacable et avec le sens de la justice justicière, j’aurais laissé partir Felixio. Je l’aurais laissé partir non pas par manque de preuve qu’il a volé les 600 dollars de ration d’habits, mais par manque de preuve sur la raison qui l’a poussé à le faire.

Si j’étais le juge, j’aurais dit à Felixio, péremptoire : « Vous êtes bien un salaud pour avoir volé vos autres frères et sœurs dans un moment de tragédie commune ; un moment de feu à la maison ! Un moment de pleurs, de chagrin, de désespoir ! Mais vous n’êtes pas coupable, salaud ! C’est la société qui vous a rendu si bête, si égoïste et si sans-conscience qui est coupable. Partez ! et amenez-moi la société le corps dans un cercueil et la tête au pied d’une guillotine ! » Il a aussi peut-être volé, Felixio, pour, si j’ose dire, transcender la bête en soi, la peur de la bête. Et la bête a volé.

Feu ! Feu ! Feu à la maison ! Et puis silence. Silence. Silence. Beaucoup d’espoirs y auront été envolés ; beaucoup d’objets et de meubles y auront été calcinés ; beaucoup de souvenirs sentimentaux y auront été détruits ; beaucoup de chagrin, de tristesse, de désespoir y auront été éprouvés. Mais il reste, comme l’a dit cet ami philosophe, des souvenirs, des idées et des rêves qui ne peuvent pas être consumés : il reste la vie et la famille humaine.

—Tontongi

Poèmes de Marylin Laurent

Insomnie

Je n’arrive plus à m’endormir
Depuis ce jour-là
Ce jour où j’ai senti ton sourire s’évanouir
Dans le néant
J’ai vu les vagues de l’océan
Engloutir mes rêves
Effacer l’image de toi et de moi
Enlacés
Je tourne et retourne seule dans mon lit
Du crépuscule jusqu’à l’aube
Me posant des questions
Qui disparaissent dans les étoiles
Éternellement sans réponse
Je t’aime, si tu ne le sais pas
Je t’aime et j’ai mal ce soir
J’ai mal, non pas parce que tu ne m’aimes pas
Je ne saurai jamais
Ce que tu ressens dans ton cœur
Mais parce que je dois tout oublier
Tout effacer
Et tout recommencer
Quand je croyais être arrivée à bon port
J’ai mal parce que tu ne vois pas
La vie que je me suis tissée
Les rêves dont j’ai façonné une virtuelle réalité
Eh oui je t’aime malgré moi, malgré toi
Malgré nous, malgré eux
Mais hélas, il me faut t’annihiler
Il me faut t’oblitérer
Pour que je puisse m’endormir encore une fois
Et peut-être rêver à nouveau…

Je veux de toi

Je ne veux ni d’un président, ni d’un roi
Surtout pas de demi-dieu
Un sauveur, un libérateur
N’aurait pas de place dans mon cœur
Un héro encore moins
Tu ne m’apprendrais point le goût du beau
Tu ne m’expliquerais nullement
Que le chant des moineaux
Soit plus exquis que la harpe
Les finesses et délicatesses
Laisse-les de côté
Ainsi que la prétention et le faux
Je ne veux ni de bijoux ni de châteaux
Le tour du monde
Et tout ce qui vient avec
Je m’en fiche
Tes sous, euros et dollars
Ne pourraient nullement
Acheter ce qui me fait sourire
Je ne saurais te guider
Tu ne devrais pourtant pas tricher
Car la réponse est en toi
Ne me cueille pas le soleil
Je ne veux pas d’étoiles
Dans un coffret
Ni de bungalow
Sur le Pacifique
La mélodie des ruisseaux
Le ronron des abeilles
Une goutte d’eau parmi des milliers
Tout ! Rien ne saurait égaler
Ni mesurer
La simplicité, la sincérité
La pureté de la vérité
Que ton toucher soit humble et doux
Ton baiser franc et tendre
Ton regard et ton amour limpides
Je ne veux que de toi
Sans rien, sans tout
Sans effort
Ton bonheur, ta souffrance
Avec moi, partager
Mélanger, confondre et fusionner
Connais toi-même ton bonheur
Sans m’en charger
Je veux de toi
Sans moi
Avec moi
Heureux comme ça

Toi

J’ai soif de toi
Toi dont le sourire m’enchante
Toi dont le parfum m’enivre
Toi dont la voix m’ensorcelle
Toi dont l’arôme me séduit
Toi dont les mains m’enflamment le corps
Toi dont la passion m’assujettit
Toi dont l’aura m’envoûte
Toi dont le nom perpétue sur mes lèvres
Toi qui demeures dans mes pensées
Dans mon cœur
Toi qui n’existes pas…

—Marylin Laurent

Poème de Marie Ludie Monfort

Pays blessé

Quand la sonnette mortuaire résonnait
Goudou! Goudou! Goudou!
Haïti a dansé
La danse macabre du désespoir
Le soleil s’est brusquement tué
Oh Haïti !
Ton cœur s’est brisé en mille morceaux
Paralysant tout ton corps
Incapable de sauver tes maigres ressources
Ton palais, tes ministères, tes caisses
Démolis en un éclair
Les fruits de tes entrailles
Pétrifiés sous les décombres
Plus de quatre mille amputés
Plus de deux cent mille emportés vers l’au-delà
Des milliers envolés sous les ailes lâches de l’exil volontaire
Ô Haïti !
Blessée, amputée
Endeuillée, dénudée
Comment rester insensible au cœur de cette désolation ?
Non Haïti !
Tu ne mourras pas!
L’exogène secours n’a pas tardé à venir
Mais cela est trop peu
Venez fils et filles
De cette terre blessée
Panser Haïti de ses fissures
Reconstruire ses cellules
Haïti a besoin de vous
Plus que jamais
Venez bâtir une nouvelle Haïti
Où la paix, l’éducation, la transparence, l’entraide
Constitueront les pierres de cette bâtisse
Qui ne s’écroulera plus
Quand passera
Goudou ! Goudou !
La sonnette funeste
Enfin, je visionne une Haïti nouvelle
Tout à fait prospère.

—Marie Ludie Monfort

Mirage —by Kelli Foster

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